• Députés : les Québécois paient trop cher          

    Par Yvan M. Roy      (Le Soleil, 6 décembre 2013 - Carrefour des lecteurs)

     

    Le Comité consultatif indépendant sur les conditions de travail des députés Québécois a estimé dernièrement que les rémunérations versées aux 125 élus québécois devaient être revues à la hausse pour les porter à 135 000 $ annuellement. La présentation a été faite en comparaison avec la rémunération des députés fédéraux qui gagnent 160 200 $. La démonstration aurait été plus convaincante si les membres du comité avaient considéré les données concernant les grandes provinces du Canada.

     

    Les deux plus importantes provinces du pays en termes de population sont l’Ontario avec 13,5 millions, et le Québec avec 8 millions. Malgré l’écart de 5,5 millions de personnes entre les deux provinces, l’assemblée législative d’Ontario compte 107 députés, tandis que l’assemblée nationale du Québec, 125.

     

    Le salaire de base des députés Ontariens est de 116 000 $, celui des députés Québécois 88 186 $. Les Ontariens paient donc un total de 12,4 millions $ pour le salaire de base de leur députation, tandis que les Québécois paient 11 millions $. Un député de l’Ontario représente en moyenne 126 000 personnes, un député Québécois 64 000. Tenant compte de la population respective des deux grandes provinces, chaque Ontarien paie 0,92 $ pour être représenté à la législature, et chaque Québécois 1,37 $.

     

    Quelle serait la réaction publique si ,un bon jour, le prix à la pompe de l’essence au Québec était de 1,37 $ alors qu'en Ontario, il était de 92  cents ? Poser la question, c’est déjà y répondre.

     

     

     


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  • Mémoire présenté à l’occasion de la consultation publique du 9 décembre 1993 sur le projet de règlement relatif aux plans d’implantation et d’intégration architecturale (PIIA) pour les bâtiments et zones patrimoniaux.

     

    Par Yvan-M. Roy

     

    Après avoir pris connaissance du projet de règlement adopté le 15 novembre dernier, je suis en mesure d’affirmer que premièrement, il s’agit d’une disposition très contraignante pour les citoyens, deuxièmement, le projet de règlement répond partiellement aux objectifs visés, troisièmement, l’objet caché du règlement est de justifier la démolition du Monastère du Précieux-Sang.

     

    Les objets avoués du projet de règlement consistent à faire en sorte que les bâtiments « assujettis »demeurent des éléments forts et exceptionnels du patrimoine lévisien et à préserver des zones qui caractérisent Lévis de par l’architecture des bâtiments, le paysage urbain ou les éléments historiques du patrimoine municipal. Le Monastère du Précieux-Sang est exclu du périmètre désigné, de même que plusieurs autres bâtiments hautement significatifs.

     

    1. Un règlement très contraignant pour les citoyens

     

    Le 7 octobre 1992, à l’occasion d’un précédent mémoire, j’ai eu l’occasion de préciser que Lévis avait adopté une règle d’application stricte pour préserver le caractère du Vieux-Lévis.[1] Le projet de règlement adopté le 20 novembre dernier pour créer des plans d’implantation et d’intégration architecturale (PIIA) dans la haute-ville de Lévis vient confirmer mes affirmations.

     

    En effet, le projet de règlement touche 35 zones différentes et plusieurs centaines de petits, moyens et grands propriétaires.  

     

    [ p. 1]

     

    Pour assurer la préservation et l’amélioration du cachet ancien et authentique des bâtiments et ensembles architecturaux, la ville met en place des mesures de contrôle sur les bâtiments d’intérêt patrimonial, « assujettis » ou non, sur les bâtiments modernes, et sur l’implantation et l’intégration des nouveaux bâtiments. Il s’agit principalement «  de maintenir les caractéristiques dominantes du paysage urbain de ces zones ».[2]

     

    Les toitures, le revêtement des murs, les portes et fenêtres, les éléments en saillie et les ornements, les ajouts, les couleurs, les façades, les enseignes, les auvents, l’éclairage extérieur, les travaux paysagers seront soumis à la discrétion d’un comité public.

     

    Un des côtés les plus positifs du règlement, c’est que la contrainte historique s’applique intégralement à toutes les zones. Il ne s’agit pas de zonage parcellaire (spot zoning), contrairement à ce qui s’est produit dans le secteur de la Traverse. J’aurai l’occasion de revenir sur ce point.

     

    La contrainte est accompagnée de sanctions contre les contrevenants. Ces sanctions peuvent aller jusqu’à 1 000 $ pour un individu et 2 000 $ pour une société incorporée. En cas de récidive, l’amende maximale est doublée.

     

    2. Un règlement justifié

     

    En toute objectivité, je considère que le projet de règlement, s’il est adopté sans modifications, sera difficile d’application. Le règlement pose de grandes limites à la liberté individuelle. Par ailleurs, considérant que depuis plus d’un siècle, un nombre appréciable d’auteurs nationaux et étrangers se sont prononcés sur le caractère historique de Lévis, et que des études et inventaires récents ont identifié un grand nombre de bâtiments remarquables, le règlement m’est apparu justifié, du moins pour les 35 zones spécifiées. Ma réserve est que les zones ont été retenues de manière arbitraire.

     

    Le règlement est très contraignant parce que le caractère historique de Lévis est très grand.

     

    [ p. 2]

     

    3. Un règlement tardif

     

    Personnellement, j’estime que le projet de règlement est tardif. Il s’agit d’une mesure qui aurait dû être adoptée vers 1950, l’année où a débuté le vandalisme dans la ville de Lévis par la destruction du Bureau de poste à la Traverse. Avec un tel règlement, l’ancienne administration de la Ville n’aurait pas si facilement obtenu la démolition de l’ancien Hôtel de Ville de la rue Déziel et de l’ancien Poste de police de la rue Saint-Georges.

                         

    [ p. 1]

     

    4. Un règlement incomplet

     

    Le règlement m’et apparu incomplet parce qu’il n’assure pas les caractèristiques dominantes du paysage urbain dans son ensemble.

     

    Le périmètre visé occupe tout le plateau qui surplombe la falaise à partir de la Terrasse jusqu’à la rue J.-K. Laflamme. Tant du point de vue historique que paysager, le principal élément fort de Lévis est la falaise. En 1759, Québec fut détruit à partir de la falaise de Lévis. Cette falaise est directement devant le Château Frontenac. Le règlement n’assure d’aucune manière la protection de la falaise. À Lévis, la falaise varie en élévation de 80 à 130 pieds. En face, la falaise de Québec a 200 pieds (Terrasse Dufferin).

     

    Au pied de la falaise, Lévis a fait du zonage parcellaire dans le secteur de la Traverse. À l’est et à l’ouest, la réglementation actuelle permet la construction de bâtiments hauts de 17 mètres, soit une norme légèrement supérieure à celle du Vieux-Port de Québec. C’est à la Traverse que la ville a construit en 1864 son premier hôtel de ville, qui sert actuellement de gare intermodale.

     

    Je tiens donc à répéter le même avertissement que j’ai formulé devant ce même conseil le 7 octobre 1992 :

     

    « Je prévois donc que sous une perspective obtenue à partir du Vieux-Port de Québec, la falaise de Lévis sera masquée de 66% à 100% sur une distance de 300 mètres entre le Chantier Maritime A.C. Davie et la Côte Bégin ».[3]

     

    5. La règle de deux poids, deux mesures

     

    À l’occasion de la consultation sur les règlements d’urbanisme le 7 octobre 1992, j’ai indiqué que la ville de Lévis suivait une règle fondamentalement injuste et immorale en obligeant les petits propriétaires de la haute-ville à respecter le caractère patrimonial de leur secteur, et en n’imposant pas une règle identique pour les propriétaires du secteur de la Traverse, notamment pour les zones contigües à l’historique chantier maritime A.C. Davie.[4]

     

    [ p. 3]

     

    Pour le contenu minimal d’un PIIA à la haute-ville, le règlement oblige « une vue en isométrie ou en perspective du bâtiment projeté » afin d’assurer l’intégration avec les autres bâtiments de la zone. Comme à la haute-ville, il y a à la Traverse des bâtiments patrimoniaux dans la majorité des zones, il y a une uniformité dans l’application, et il y a également réciprocité dans les obligations d’une zone à l’autre.

     

    À la Traverse, la zone Pa 59-44 (Chantier maritime A.C. Davie ) est probablement la zone la plus significative au point de vue historique dans la ville de Lévis. La ville vient d’acquérir au coût de 1 050 000 $ l’historique chantier Davie avec de fortes subventions canadiennes et québécoises.

     

    Comment expliquer que la ville de Lévis n’a pas imposé aux autres zones voisines, notamment la zone Hd 59-65 (Côte Bégin- J.-L. Demers) la réalisation d’une vue en isométrie ou en perspective des bâtiments projetés pour assurer le respect de la falaise et des bâtiments projetés pour assurer le respect de la falaise et des bâtiments de la zone Pa 59-44. La réglementation actuelle permet la construction de 50 logements et plus à l’hectare dans la zone Hd 59-65. L’effet de la réglementation dans cette zone est de permettre la construction de trois unités de 50 logements sur 6 étages.

     

    Quelle sera la valeur patrimoniale du Chantier A.C. Davie quand le potentiel immobilier des zones contigües aura été exploité suivant les libéralités de la réglementation actuelle? À mon avis, le potentiel sera très réduit. La réglementation manque de cohérence.

     

    Je suis d’avis que les investissements du gouvernement du Canada ( 300 000 $) et ceux du Québec (600 000 $) visaient d’abord autre chose que la mise en valeur du Chantier A.C. Davie.

     

    [ p. 4

     

     

    Le secteur de la Traverse est la partie nord de l’historique quartier Lauzon, quartier dont la partie sud couronne la falaise de Lévis. Il y a l’application de la règle de deux poids, deux mesures, concernant la mise en valeur du quartier Lauzon. Dans ce quartier historique, les propriétaires d’en haut ne sont pas soumis aux mêmes obligations que les propriétaires d’en bas. Je considère l’actuel projet de règlement cet égard comme injuste et immoral relativement aux autres règlements qui ont été adoptés pour le secteur de la Traverse.

     

    6. Des oublis majeurs et le véritable objet

     

    Je ne saurais terminer mes commentaires sans mentionner que le règlement aurait dû élargir le périmètre d’application pour inclure le Monastère du Précieux-Sang, le Manège militaire, et la maison Carrier-Couture (rue Plante).[5] Concernant les deux premiers bâtiments, il est vrai qu’il s’agit de constructions du XXe siècle, mais lorsqu’il s’agit de la plus ancienne maison de Lévis et qu’elle se trouve à 50 mètres au sud à l’extérieur du périmètre, il y a de quoi s’interroger sur le véritable objet du règlement. Je suis d’avis que le périmètre a été retenu après une dissection arbitraire et aveugle.

     

     Le règlement aurait-il pour véritable objet de justifier la démolition du Monastère du Précieux-Sang ? Les faits me portent è répondre positivement à cette question.

     

    Les membres du Comité consultatif d’urbanisme et ceux du Comité « ad hoc » sur le patrimoine portent une lourde responsabilité face à la conservation du patrimoine lévisien. La démolition du Monastère du Précieux-Sang pourra éventuellement leur être imputée.

     

    Les Américains ont transporté pierre par pierre des monastères achetés en Europe. Pourquoi ne pas conserver intact celui que nous avons ici à Lévis ?

     

    [ p. 5]

     

     

     

     

     



    [1] Mémoire sur les projets de règlements d’urbanisme de la ville de Lévis, Yvan-M. Roy, 7 octobre 1992. ‘’Lévis a choisi d’utiliser une règle d’application stricte pour préserver le caractère du Vieux-Lauzon et celui du Vieux-Lévis, deux secteurs près des églises Saint-Joseph et Notre-Dame. J’ai identifié cette mesure comme étant une règle « Macdonald patrimoniale ».  Lévis force par l’effet de la loi douze cents petits propriétaires à respecter le caractère patrimonial de leur qiuartier. P. 26

    [2] Projet de règlement, p. 23

    [3] Voir Note 1 (Mémoire sur les projets….) p. 12. Il est important de préciser que l’élévation des terrains en bordure de la rue à la Côte Bégin débute au niveau de 7 mètres.

    [4] Voir Note 1 (Mémoire sur les projets….), p. 26. « Lévis a choisi d’utiliser une règle d’appliction très libérale pour guider l’aménagement des secteurs patrimoniaux de la Traverse et de la Pointe-de-la-Martinière. J’ai identifié cette mesure comme étant une règle « Macdonald impériale ». Lévis consent à ce qu’un ou deux gros promoteurs échappent à l’obligation de respecter la caractère patrimonial des lieux. Lévis adopte la règle de deux poids, deux mesures, ce qui à mon avis est fondamentalement injuste et immoral. Le site A.C. Davie d’un potentiel exceptionnel sera écrasé par « un balconville sur Saint-Laurent ».

    [5] Léon Roy pose la question suivante dans Les premiers colons de la ive-Sud du Saint-Laurent : N’est-ce pas Ignace Carrier qui avait construit la première partie en pierre de cette plus vielle maison de Lévis. (p.99)  (Ignace Carrier, né en 1727, décédé le 2 septembre 1759 pendant le siège de Québec, enterré dans l’église de Lauzon le 11 décembre suivant.

     

    La tradition orale dans notre famille est que le Colonel Benedict Arnold qui commandait l’expédition des troupes du Congrès fut hébergé par Ignace Couture et Véronique Carrier dans cette maison en novembre 1775. Cette information trouve confirmation dans le rapport des commissaires Baby, Taschereau et Williams de 1775 où il est écrit qu’au début de novembre 1775, Ignace Couture fut délégué en Beauce par l’assemblée de Pointe Lévy pour presser les Américains d’arriver à Pointe Lévy dans les plus brefs délais.


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